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06/04/2009

De la violentisation du monde : le massacre et la méditation

Guerres, épidémies, scandales, massacres (ces dernières semaines ont été, sur ce plan, particulièrement riches en événements aux Etats-Unis, spécialement dans l'Etat de New York), catastrophes naturelles... La rencontre entropique de l'ensemble de ces éléments agressifs issus du monde extérieur produit sur les individus (les habitants de la Terre, aurait plus poetiquement dit Hannah Arendt) un cocktail explosif d'incertitudes, de difficultés matérielles et de mal-être.

J'avais autrefois été surpris, presque choqué tant la politique me paraissait alors tout à la fois une référence (normative) et un projet (désirable), qu'une amie déclare, pour se protéger, elle et sa famille, prendre soin de se couper chaque jour de ce flot de nouvelles négatives en se refusant à consulter quelque source d'information politique que ce soit.

Depuis lors, comme dirait Serge Bramly (voir "Le premier principe, le second principe"), l'entropie du système semble s'accroître de façon exponentielle, suivant en cela une pente climatique aussi factuellement inquiétante que psychologiquement anxiogène.

Cela finit par engendrer ce que l'on pourrait appeler une sorte de "violentisation" du monde. Violentisation ? Ce phénomène dépasse en effet la seule juxtaposition des violences : plus que leur addition, il serait leur coefficient multiplicateur. Il s'agit d'autre part, à l'évidence, et aussi bien pour la génération née dans les années 80 que pour celle qui l'a précédée, moins d'une phase, d'un moment donné de l'histoire, que d'un processus à la fois continu et croissant.

Au-delà des médias traditionnels, à travers les réseaux sociaux, mais aussi les murs, les ascenceurs, les moyens de transport, les salles d'attentes, et jusque dans les toilettes publiques, l'intrusion polymorphe des médias dans la vie quotidienne, spécialement en Amérique du Nord, en mêlant inextricablement le public et le privé, le conflit et l'intime, à la fois justifie de se protéger de ce flot d'informations et rend cette tentative caduque.

Je me souviens encore, dans les années 70, des journaux télévisés relatant, bulletin après bulletin, jour après jour, sans relâche, les guerres du Moyen Orient, les affaires, les attentats, les prises d'otage. Puis ce fut au tour de la crise, du chômage, des restructurations industrielles. C'était à la fois incompréhensible et tragique.

Si l'univers des adultes peut, tant bien que mal, s'accommoder de ce marasme, que peut celui de l'enfant ? "Dans un monde d'incertitude et de peur, chaque enfant devrait avoir un moment quotidien pour plonger en lui-même et découvrir l'énorme réservoir d'énergie et d'intelligence qui est en nous" dit David Lynch à l'occasion d'une série de manifestations organisées à New York pour promouvoir la méditation transcendentale à l'école.

La politique dessinait jadis la promesse, peut-être pas d'un salut, mais enfin d'une issue possible. Elle en signe aujourd'hui la faillite. La relation communautaire ou la trajectoire individuelle étaient injustifiables (signe tout à la fois d'indifférence, de conservatisme et d'irresponsabilité); ils représentent aujourd'hui un des rares espaces disponibles pour le déploiement, malgré tout, de l'aventure de vivre.

12/02/2009

Broadway express (Matrix des misérables)

C'est un petit MacDo sur Broadway, au coeur de l'Upper West Side - à grandes mailles, entre Columbia University et le Lincoln Center. Si discret qu'on ne le remarque presque pas, il faut plusieurs semaines pour le repérer. Il semble tout étriqué entre deux boutiques de mode bon marché - Victoria Secret ou Gap ont pignon sur rue un peu plus haut, une annexe de Barneys vend du Paul Smith un peu plus bas. En face, un restaurant de soupes diététiques, à l'angle un Barnes & Nobles qui affiche en grand la couverture du xième bouquin sur Obama, dont la photo recouvre aussi les unes des magazines dans les kiosques à l'angle des carrefours.

Un déjeuner rapide, en début de semaine, tandis que le président entame ce jour-là une nouvelle tournée dans le pays, à Elkhart (Indiana), pour vendre son plan de soutien à l'économie en s'appuyant sur les fermetures d'activités et les licenciements qui, chaque jour, plombent le pays par milliers. A l'intérieur, on est un peu après le rush de midi-une heure, c'est assez calme. Une cinquantaine de personnes environ, des femmes pour la plupart, essentiellement noires, la cinquantaine en moyenne, avec quelques ados et de plus rares personnes âgées généralement accompagnées d'une aide à domicile. Un quart environ sont latinos, quelques hommes isolés. De rares femmes blanches, une, puis deux qui passent, rapidement, en balayant furtivement l'assistance du regard tout en se dirigeant droit vers les caisses.

Ce n'est pas du mépris, c'est presque de la honte comme celle, pourtant digne, de cette vieille dame distinguée sur le trottoir d'en-face qui se décide à quémander quelques quarters aux uns et aux autres en donnant, pour ainsi dire physiquement, l'impression de s'excuser, de s'effacer. Jeunes latinos s'échinant dans les arrière-cuisines ou sortant des caves et remontant les grandes avenues à contresens en vélo, mendiants qui se traînent d'un abris de fortune à l'autre, personnes âgées qui sombrent, collecteurs de canettes... les miséreux traversent la ville en tous sens. Ils doivent sans doute mourir quelque part, à quelques encablures des restaurants à la mode et des clubs de jazz, mais on ne sait trop où. Ce n'est pas que les gens disparaissent d'ailleurs, c'est qu'ils s'effacent comme sur une pellicule trop exposée, comme dans un Matrix financier qui aurait préempté le réel.

C'est déjà vrai, quoiqu'un peu moins marqué, lorsque l'on fait une pause sur l'autoroute pour les grandes distances entre Columbus et Chicago, ou bien entre Toronto et New York : le MacDo y est quasiment le seul restaurant possible, mais c'est surtout le territoire des pauvres gens, abonnés à ces repas mortifères pour une poignée de dollars. Il y a des jeunes, mais ce sont les plus âgés qui dominent, souvent mal fagotés, de l'embonpoint, parfois difforme, l'air malade. Le regard triste. Le même regard que l'on retrouve dans le MacDo de Broadway chez cette black assez distinguée en face, cet adolescent mal dégrossi près de la poubelle ou encore le postier, un peu en retrait, un carribean on dirait.

Le regard triste ? Non. Perdu, pas triste. Avec un léger flottement qui oscille entre la mélancolie et la concentration. C'est cela, une forme de concentration, analogue à cette sorte d'attention que l'on développe au beau milieu de l'oeil d'une dépression tropicale, lorsque l'on guette le mondre signe, la plus modeste indication de la suite, sans se faire trop d'illusions - un infime sursis avant le déchaînement de la tempête. Une dernière fenêtre de lucidité avant l'artillerie lourde.

Ce qui se passe en réalité très exactement à ce moment-là, vers 14h07, à l'angle de Broadway et de la 80ème Ouest, dans ce MacDo dont les regards convergent vers l'extérieur, c'est quelque chose comme l'arrêt progressif du mouvement, si inhérent à la culture américaine en général et à New York en particulier. Comme un film qui passerait tout à coup au ralenti - une réalité qui saute soudain à la figure en retournant sur Broadway avec des magasins qui ferment les uns après les autres, des taxis qui se font rares en plein milieu de la journée, si peu de monde dans les rues. Un train lancé à toute allure mais dont l'inertie de la vitesse, malgré le freinage, ne permettra pas d'échapper à l'abîme. Quelque chose qui approche de la fin, dont on sait qu'il va être de l'ordre de la douleur et de l'effondrement - et que ce jour-là, à cette heure précise, on peut presque palper tant il s'est concentré dans le regard des nouveaux misérables.

02/02/2009

Un dîner à New York autour de Strauss-Kahn (la crise, le monde, l'éducation)

Trois titres principaux à la une du New York Times hier : les problèmes posés par les bonus du secteur bancaire, les difficultés rencontrées par les professions juridiques - et l'intervention annoncée de Dominique Strauss-Kahn, à New York, devant les alumni de Sciences-Po.

Le directeur général du FMI n'y est pas allé par quatre chemins : la crise actuelle est grave et sera sans doute plus longue et plus profonde que prévu. Un an ? C'est un délai qui paraît court pour en sortir et les scenarii qui avaient laissé entrevoir une sortie de crise aidée par des économies émergentes présumées plus florissantes ont fait long feu dans ce qui s'impose, au moins depuis six mois, comme la première crise véritablement globale du capitalisme.

Deux, trois ans ne sont pas impossibles : le secteur financier est loin d'être sorti des problèmes; et les effets des plans d'aide tardent à se faire sentir dans toutes les grandes zones économiques. Impossible pourtant de sauter cette étape, aussi économiquement nécessaire que politiquement impopulaire, de soutien au secteur bancaire et financier sans laquelle l'économie ne saurait repartir.

Parallèlement, le principe d'un soutien volontariste de l'économie par une dépense publique active ("fiscal stimulus"), mis en avant par le FMI il y a un an déjà, s'est diffusé désormais à tous les grands pays - temps nécessaire de la pédagogie, de même peut-être qu'un certain temps sera nécessaire avant une nationalisation, au moins partielle, du secteur bancaire, si l'on en croit du moins les dernières analyses de Krugman, d'ailleurs récemment relayées par les ouvertures de Timothy Geithner.

Il reste que, plus qu'une crise financière, la crise actuelle apparaît comme une crise plus générale de gouvernance. Elle pose la question d'une avancée souhaitable vers une régulation plus globale qui pourrait se faire, de façon pragmatique, au niveau du G20. Elle suggère aussi d'élargir le rôle du FMI en matière de prévention des crises - des analyses sans doute menées de concert avec celles développées par Attali dans "La crise, et après?".

A moyen terme, au-delà des soubresauts économiques et financiers de la crise actuelle, les pays qui s'en sortiront le mieux sont-ils ceux qui ont le plus investi dans l'éducation ? Le directeur général du FMI fait ainsi le lien entre la situation économique générale et l'ambition de Sciences-Po de développer un modèle de financement plus anglo-saxon. Car si la dépense publique pour l'éducation est similaire en France et aux Etats-Unis, aux environs de 6% du PIB dans les deux pays, celle-ci n'est qu'une partie de l'investissement en Amérique quand elle en représente, en France, la quasi totalité - un fait à intégrer dans l'analyse plus globale que propose Frédéric Martel du modèle culturel américain.

Différence ? Un soutien privé via dons individuels et mécénat extrêmement vivace aux Etats-Unis, à quoi s'ajoute une bien moins grande ouverture à la compétition internationale en France, et ce en dépit de talents incontestables. Ainsi, sur les cinquante postes d'économistes ouverts par le FMI au cours des derniers mois, seule une portion infime a pu être disputée par des candidats français.

D'où l'objectif de Sciences-Po avec ce premier fund raising dinner à New York : lancer aux Etats-Unis une vaste campagne de levée de fonds pour permettre à l'Institut de la rue Saint-Guillaume de poursuivre ses projets de développement - un engagement international renforcé et une ouverture accrue à la diversité - au-delà des limites du financement public.

Rien moins, résume Richard Descoings, le directeur de l'IEP, que "d'ouvrir les portes et les fenêtres d'une société de castes". Un des rares moments d'applaudissements spontanés de la salle, qui valide aussi sec la différence de dynamisme et, plus encore, de mentalité existant entre les deux modèles.

25/01/2009

Inauguration Day, au Docks (PS) Si par une nuit d'hiver... (le homard et la palourde)

12 est une note honorable sanctionnant un bon dîner qui, dans le cas du Docks, a souffert davantage d'une exigence poussée en matière de cuisine italienne que d'une faiblesse intrinsèque - le pour-soi de l'en-soi, en quelque sorte : ce n'est pas la pâte en soi (pas plus que la palourde) qui font question, c'est l'idiosyncrasie du goûteur.

Sur ce, rien de tel que de repasser furtivement le soir suivant au lieu dit pour vérifier la première impression. Faire simple. Un lobster roll, sorte de sandwich ouvert, composé d'une farce fraîche de homard et de concombre notamment, est un délice. Il est accompagné de French fries, qui faisaient encore récemment débat au bar en question - la décision du Congrès de les rebaptiser en Freedom fries le lendemain du discours de Villepin à l'ONU reste encore dans les mémoires à New York comme une sorte de cauchemar conjugué de l'intelligence et de l'humanisme.

Passons. La bouteille de Ketchup est inévitable, mais elle est ici aussi culturellement nécessaire que gastronomiquement superflue. Une Samuel Adams fera très bien l'affaire. L'endroit se confirme comme une adresse plus que respectable, aussi amicale au comptoir que familiale en salle - on vient en particulier y déguster de généreux homards, ou bien des Saint Jacques du Maine. Un petit côté Art déco à la fois sobre et soigné. Et une francophilie indéniable, qui transparaît à travers de belles affiches des années trente, l'une, la "Quinzaine du poisson", annonçant une exposition au Grand Palais (janvier-février 1933) sponsorisée par le Musée de la marine, l'autre faisant la promotion d'une association de pêcheurs - toutes deux en français.

Cette collation tourne autour d'une trentaine de dollars et tire le 12 vers le 14, sans hésitation, aussi bien pour la qualité de la cuisine (une cuisine sharp, dont il faut encore souligner l'économie de moyens, assez singulière aux Etats-Unis où il faut souvent montrer autant que faire) que pour le décor à la fois public et intimiste, ou encore l'ambiance chaleureuse.

Une adresse qui s'impose pour le dîner léger en celibataire d'un dimanche d'hiver et de travail, quand New York se laisse peu à peu envelopper d'une neige doucement envahissante - festive sur Broadway, presque immaculée sur West End, féérique sur Riverside, à deux pas de l'Hudson River dont on distingue à peine les flots dans le halo que forment les nuées de flocons devant les lumières du New Jersey. Obama évoquait ce dimanche depuis Baltimore, en route vers Washington, les temps difficiles qui attendent les Américains, sur les écrans de CNN, Wall Street s'enfonce un peu plus dans la crise. Mais c'est comme si cette neige, dans un climat froid qui se stabilise en douceur autour de zéro, redonnait à tout cela l'allure festive, rassurante, miraculeuse des nouveaux départs.
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Un autre soir, un dîner de retrouvailles (il a planché communication en Angleterre, elle lingerie à Hong-Kong). Une table parfaite, côté restaurant, surplombant le bar et la brasserie. Ambiance à la fois chaleureuse et calme, en milieu de soirée. Un Manhattan roll (tempura de crevettes, avocat, riz, assaisonnements divers) pour deux, et homard puttanesca - une merveille -, le tout accompagné d'une bouteille de Fumé blanc californien. Ni dessert, ni café. Un incontestable 14 qui confirme définitivement une adresse de référence dans ce quartier. Compter cette fois aux alentours de 130$ pour deux, pourboire inclus.

21/01/2009

Inauguration Day, au bar (2) Au Docks (se concentrer sur les belles choses)

Cela fait longtemps que vous passez devant l'endroit, qui se trouve être à deux pas de la maison en remontant Broadway vers le nord. Vous y avez même fait un repérage un jour en passant, parce que rien ne vaut, en ces matières importantes et délicates, une prise de température personnelle. Un beau soir, pas plus tard que samedi dernier, vous vous y arrêtez pour de bon. Entre la salle, un peu surélevée et tout en longueur sur votre droite, la partie brasserie au centre et le bar - une organisation qui rappelle Lindey's, la brasserie qui, au beau milieu du Midwest, vous faisait office de cantine -, votre choix est fait. Vous filez au bar, vous savez bien que, si l'on y est parfois un peu plus à l'étroit, on y est aussi plus libre. C'est aussi pourquoi on y dit généralement plus de bêtises, avec une générosité qui n'est guère dupe d'elle-même, ce qui reste, à cette stricte condition près qui rend la bêtise praticable, un des droits fondamentaux de la personne humaine. En quoi tous les bars de la planète s'apparentent d'ailleurs à une sorte d'immense réserve naturelle.

Pour autant, vous n'êtes pas au zoo mais au restaurant. Que l'on vous prenne pour un reporter comme le psychologue juif assis à votre gauche (vous êtes trop cool le week-end) ou pour un espion comme le déménageur arriéré de Columbus (et parfois inutilement mystérieux sur vos activités), il convient de passer à l'action (peut-être devriez-vous au passage en tirer la leçon et agir plus rapidement pour couper court aux rumeurs). La spécialité de l'endroit, ce sont les fruits de mer ; il n'y a que quelques poissons mais beaucoup de coquillages. Originalité, qui fait songer cette fois au japonais sur Castro, à San Francisco : c'est un chef japonais qui porte un soin maniaque à des couteaux de tueur en série, à l'extrémité du bar et à l'opposé de la cuisine, qui règne en maître non seulement sur les fruits de mer, mais aussi sur une sélection de japanese rolls qui ont l'air tout à fait recommandables.

Vous optez pour des linguine aux fruits de mer - un peu plus larges que les n°7 de De Cecco, l'étalon absolu en ce domaine, et c'est dommage parce que, techniquement, cela nuit un peu à la fluidité de l'ensemble, notamment au moment d'enrouler les pâtes. Celles-ci sont préparées avec des palourdes et cuisinées au vin blanc, l'option au vin rouge existe aussi, mais elle vous a toujours paru suspecte, comme la faute de goût qui consiste à associer du parmesan avec des pâtes aux fruits de mer - on se fait virer d'un restaurant sicilien de la côte pour moins que ça. Là-dessus, la barmaid black, au demeurant amicale, élégante et pro-Obama en dépit d'un positionnement plus libéral, se rattrappe de l'affaire du parmesan en vous proposant un verre de Fumé blanc californien, à la fois plus vif qu'un Pouilly fumé et presqu'aussi rond qu'un Chardonnay. Jolie découverte. La pâte est assez juste, al dente et sans fioritures.

Ce n'est pas extraordinairement bon, mais c'est bien, au sens pour ainsi dire platonicien du terme, c'est conforme à l'idée de pâte. Quand le monde menace de s'écrouler, se concentrer sur les belles choses et, alternativement, sur les bonnes.

Vous décidez, pour le deuxième dîner d'affilée, de terminer par une tarte au citron accompagnée de crème fraîche qui se révèle, façon cheesecake plutôt imposante mais, somme toute, plutôt correcte. Il n'y a pas de lemoncello, vous prenez un Disaronno - il faut ça pour faire face à l'offensive conjuguée du maître d'hôtel contre le Midwest (ça vous gêne de plus en plus ces sorties à la con, plus vous courez le monde, plus vous vous rendez compte que c'est universel, plus vous comprenez qu'on n'en sortira pas - et puis, vous y avez passé un peu de temps et rencontré des gens bien ; dans les bars, et même parfois au-delà, il faut une énergie considérable pour défendre ce qui nous est cher contre la foule), du psychologue juif contre le Texas et de tout le monde en coeur à propos de l'amerrissage extraordinaire de Sullenberger, à côté de la maison.

C'est reparti pour une longue diatribe contre la catastrophe Bush dont Katrina est le modèle et l'Irak l'enfer. En résumé, en poussant à peine, du temps de Bush, les avions atterrissaient au sommet du World Trade Center, du temps d'Obama, ils atterrisssent en douceur sur l'Hudson River. A quel point New York a souffert de ces huit années et l'Amérique de son image détruite à peu près partout dans le monde, il faut passer un peu de temps avec les gens pour le mesurer. Et mon voisin le psychologue de s'emporter d'un même mouvement contre le malheur de la Shoah, le statut de personnes tolérées qu'ont les Juifs d'Amérique dans l'esprit des Texans, le scandale Mugabe, le racisme de la France mais le bonheur de Paris, et le malheur de vieillir.

Le psychologue juif qui dit avoir cent quatre ans comme s'il sortait d'une lecture de la Torah ou d'un atelier maçonnique dit aussi que la question "pourquoi" est sans doute la plus stupide du monde, qu'il faut mille fois lui préférer "quoi" et "comment". Il a raison. Au-delà même de la Shoah et des malheurs du monde, dans un restaurant, c'est un angle d'attaque qui se defend.

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Docks - Oyster Bar & Seafood Grill - 2427 Broadway / 89 St (il en existe un autre sur East Side, mais enfin le West Side a pour lui la double supériorité de la culture et de la gastronomie). Compter environ $ 50 / personne pour ce dîner au bar. Note globale pour ce dîner : 12.