Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/12/2006

Démocratie & expertise (la leçon de Segolène)

Retour sur un sujet qui a beaucoup été évoqué à propos de la primaire au PS, et que l'on voit repoindre ici ou là au sujet du développement de la blogosphère. Argument : un homme, disons, un responsable politique n'a pas vocation à être le pur réceptacle de la parole publique, faute de quoi il se disqualifie en passant de leader à suiveur d'opinions et perd, au passage, à la fois sa colonne vertébrale et sa moelle épinière. En face, le clan des experts, qualifiés, qui oppose à cette logique "populiste" le primat d'une compétence technique sur les sujets du débat démocratique. Et qui se fait balayer d'un trait au premier tour de scrutin.

Question : que s'est-il passé ? Laissons de côté ici les arguments psycho-socio-politiques sur l'apparition de la madonne salvatrice et maternante face à la vieille garde machiste - un point de vue qui, pour n'être pas dépourvu d'intérêt, verra aussi son aspect sexiste et jeuniste se corriger avec le temps. Même si le niveau global d'éducation tend à monter, je ne crois pas que beaucoup de citoyens se fassent d'illusions sur leur capacité réelle à influencer les grands dossiers publics qui, dès que l'on rentre un tant soit peu dans le détail, technique précisément, ont tôt fait de décrocher (test possible, pêle-mêle, sur la parité USD/euro, la PAC ou la réforme de la justice).

Je crois en revanche fondamental pour le succès de tout projet, de laisser - non, le terme fleure trop la "tolérance"-, d'ouvrir délibérément un espace d'expression permettant aux gens d'entrer dans un projet, et plus exactement dans une dynamique. Si le projet est bon sur le fond, mais que je n'y ai pas accès, ou que je m'en sens exclus, alors je le jugerais mauvais - et ce, quel que soit le niveau de la population concernée. Essayez donc de faire adhérer un comité exécutif ou même un conseil de ministres à un projet sur lequel il n'aurait pas eu son mot à dire (je ne dis pas approuver mais adhérer, c'est-à-dire déjà agir pour le projet, à tout le moins le porter).

Tout le monde sait cela dans l'entreprise aujourd'hui et c'est ce qu'Herbemont & César, spécialistes de socio-dynamique, ont appelé de longue date un "projet latéral", c'est-à-dire un projet capable d'intégrer des demandes portées par les gens, de sorte que le projet de départ devienne aussi le leur - ce qui rend normalement la suite beaucoup plus efficace. Et comme le souligne le modèle "VUE" (Valeurs, Utilités, Envie) mis au point par les mêmes auteurs, cette intégration comporte inmanquablement une part d'irrationnel, ou disons plutôt la part affective (et statutaire) qu'il faut pour entrer dans la rationalité de l'autre. Ce n'est pas l'irrationnel qui a gagné, c'est le métier et celui-là, rien de nouveau depuis Weber, est d'abord l'art de la jauge et du désir.

Les commentaires sont fermés.