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29/05/2007

Ray Anderson a-t-il fumé la moquette ? (l'environnement, de la morale au business)

Combien de fois n'a-t-on condamné les Etats-Unis pour ne pas avoir ratifié le Protocole de Kyoto ? Leur opposition actuelle aux projets à l'étude dans le cadre du prochain G8 va dans le même sens, et continue d'irriter les milieux progressistes.

L'on oublie sans doute l'épisode des CFC qui, dans les années 80, révéla pourtant la puissance de la mécanique américaine en ces matières : abstention prudente, voire opposition forte tant que des solutions claires n'ont pas été identifiées, puis engagement très actif dès que le pays - et ses entreprises - sont en ordre de bataille.

La question du réchauffement du climat, et des moyens de le contrecarrer, pourrait bien donner lieu à la mise en oeuvre d'une stratégie similaire. Elle suscite déjà ses premières success stories, qui commencent à occuper l'espace et à préparer les esprits.

Ainsi de Ray Anderson, patron d'Interface, une compagnie spécialisée dans la fabrication des carrés de moquette, et de sa "conversion" à la cause environnementale. A la question d'un commercial sur la stratégie de l'entreprise en la matière, Anderson fit, il y a une dizaine d'années, la réponse défensive que font toutes les entreprises qui n'ont pas bien pris la mesure du sujet : " Eh bien, respectons la loi !".

Avant de se rendre compte, en réfléchissant plus avant à ce mot d'ordre, que son entreprise en réalité "plombait la terre" et qu'il fallait renverser la vapeur. Il faut dire que cette industrie, dont Interface avec plus d'un milliard de dollars de chiffre d'affaires est le leader mondial, est particulièrement consommatrice d'eau et d'énergie. Une position qui associait un révélateur : mieux motiver son équipe, et un déclencheur : éviter, un jour prochain, de finir par se retrouver en prison.

Tout le comité de direction fut alors mis à contribution pour déterminer la date à partir de laquelle l'entreprise dans son ensemble aura atteint un fonctionnement 100% écologique. C'est finalement l'échéance de 2020 qui est retenue, et Interface est aujourd'hui, après une bonne douzaine d'années de travail, presque à mi-chemin : la consommation d'énergie fossile a baissé de 45%. Et les ventes ont progressé, elles, de près de 50%.

"En fait, cette stratégie ne coûte pas, elle paie" martèle Anderson, en termes de loyauté du consommateur, d'esprit d'entreprise, d'engagement des collaborateurs - et de cash : depuis le lancement de l'opération, ce sont ainsi 336 millions de dollars qui ont été économisés par la société georgienne. Un succès qui a même conduit Interface a créer une branche consulting pour vendre sa méthode à d'autres compagnies, et qui fait de son président une sorte d'évangéliste mondial de la cause écologique avec 115 discours prononcés un peu partout dans le monde l'an dernier sur ce thème.

Une stratégie qui pourrait bien, en tout état de cause, préfigurer un revirement puissant des Etats-Unis dans les toutes prochaines années, dont le film d'Al Gore, "An Inconvenient Truth", constituera, rétrospectivement, le marqueur symbolique.