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02/06/2013

L'intelligence et le courage (un déjeuner avec Anne Méaux)

A l'invitation de Pierre Gadonneix, Anne Méaux intervenait récemment au Cercle Interallié devant le Harvard Club  de France sur le thème "communication et stratégie". De ses premières armes, la patronne d'Image 7 conserve une passion pour les affaires publiques que tous ceux qui ont voulu transformer le monde à vingt ans connaissent bien.

Sous des dehors désormais raisonnés, on devine en effet aisément ce que fut l'élan de la politique chez celle que Giscard d'Estaing, impressionné autant par sa fougue que par son premier prix de version latine, engagea à l'Elysée à ses côtés. Puis il y eut l'expérience libérale de la première cohabitation, à l'issue de laquelle nombre de jeunes conseillers partirent créer leur société de conseil en communication.

C'est la voie qu'elle choisit elle-même par un mélange d'indépendance et de désenchantement. "Ce qui manque le plus en politique, attaque-t-elle d'emblée, ce n'est pas tant l'intelligence que le courage". Au carrefour des marchés économique, financier, politique et médiatique, celle qui a su imposer Lakshmi Mittal en France veille ainsi, depuis lors, sur la communication de bon nombre de patrons du CAC 40.

Seulement voilà : elle fait le job aux côtés de ces dirigeants avec une liberté de pensée et de ton revendiquée qui est à la fois sa marque de fabrique et la clé de son efficacité. Pas question de se laisser embarquer dans l'argutie ou l'évitement, à l'heure où s'imposent partout la transparence et la suspicion.

Avec elle, on va à l'essentiel. Voilà quinze ans d'histoire institutionnelle résumés à deux figures : "le roi fainéant" et "l'agité du bocal", et un programme de communication présidentiel à deux notions : rigueur et justice - un discours de la méthode nécessaire, mais qui ne dit rien du projet. Aucune mise en cause par ailleurs du travail de Mediapart au moment de l'affaire Cahuzac. Les gauchistes d'hier ont souvent viré libéraux. Les vrais libéraux, inversement, ne rechignent jamais à une dose de subversion.

Ce qui frappe en réalité chez Anne Méaux, c'est la politique sans le militantisme, dans un domaine où il est toujours difficile de choisir entre la vérité et la puissance, le témoignage et l'action. Cela lui donne cette mobilité intellectuelle, cette liberté de mouvement même, que confèrent les engagements précoces à ceux qui ont su les importer, les transformer et les faire vivre par la suite dans leur vie professionnelle avec honnêteté, exigence, mais aussi avec indépendance à l'égard des coteries aussi bien que des convenances - et des esprits plus conservateurs pourraient en effet s'étouffer d'un certain nombre de ses propos.

Si, comme elle le dit, "la communication fait des merveilles, non des miracles", alors l'essentiel pour elle y est rigueur, travail et process. C'est une équation à laquelle un peu d'inspiration et de réseaux ne peut pas nuire. Une inspiration qui ne relèverait pas de la magie, mais de la pluridisciplinarité ; et des réseaux conçus, non comme de petits arrangements entre amis, mais comme un creuset de cercles vivants et divers.

Il reste que, selon elle, la communication ne fait pas une stratégie. Face à la pensée magique, dans un contexte où la communication s'érige partout en objet de communication en tant que telle, on voit bien la nécessité du recadrage. Le quoi ne se confond pas avec le comment, le point de départ n'est pas le point d'arrivée ; accessoirement, la prétention ne fait pas la compétence.

Mais, outre le fait que la qualité de sa déclinaison détermine en grande partie l'efficacité de sa mise en oeuvre, la qualité de la stratégie est aussi fonction de la capacité de l'organisation à la fois à s'immerger dans son environnement, à être irriguée d'idées porteuses et à entraîner le corps social de l'entreprise. Or, ce sont là autant de terrains naturels pour la communication.