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31/08/2011

Plus dure sera la chute du Dow Jones...

Tous ceux qui aiment ou qui ont aimé l'Amérique, qui ont bataillé longuement contre les préjugés qui marquent de part et d'autre la relation transatlantique, qui ont cru à la possibilité d'un redressement puis d'une nouvelle dynamique, mais qui ont vu aussi une polarisation insensée gangrener le pays jusqu'à compromettre gravement son entreprise de redressement et donner à la rengaine de son déclin un début de réalité, tous ceux-là n'ont pu que prendre ce texte de Patrick Besson, dont je livre ci-dessous de larges extraits, comme un coup de poing à l'estomac.

"... A travers les séries télé à succès, l'Amérique se penche sur son passé récent au risque de le trouver lointain (...) Outre-Atlantique, on n'en peut plus du présent qui n'est pas un cadeau. La vie semble s'être mise à ressembler, années Clinton après années Reagan, à : un huissier de justice en rogne, une cuillérée de foie de morue, une bière sans alcoool, des nouilles trop cuites, un lundi après-midi d'automne.

Qu'est-il arrivé à l'Amérique pour qu'elle aborde le XXIe siècle dans des loques qui ressemblent à une tenue de prisonnier, elle qui entra toute pimpante d'élégance morale et physique dans le XXe, où elle allait faire les étincelles que l'on sait ? Comment cette nation de rêve qui tenait lieu de phare, pendant tout le siècle dernier, à l'humanité, est-elle devenue, de nos jours, un objet de répulsion, y compris pour elle-même ?

Hargneuse, mystique, procédurière, irrationnelle, homicide, inculte : telle nous apparaît cette Amérique qui fut naguère joviale, ironique, cool, rationnelle, pacifique, cultivée. Les Américains ont faim. Les gros parce qu'ils sont au régime, les moins gros parce qu'ils sont au régime aussi. Les Américains ont soif, les alcooliques parce qu'ils ont arrêté de boire et les non-alcooliques parce qu'ils ne veulent pas devenir alcooliques. Les Américains se privent de sexe parce qu'ils ne veulent pas mourir et de parole parce qu'ils ont peur de déplaire (...)

Haïs dans presque tous les pays du globe au point qu'ils n'y construisent plus des ambassades mais des châteaux forts, les Américains viennent d'ajouter un vice à leur situation internationale déplorable : la pauvreté (...)

Et si l'Amérique était en train de devenir, après un bref moment d'éclat mondial, ce qu'elle était au début de son histoire : une puissance secondaire, provinciale, presque anonyme, sujette au fanatisme religieux et au repli sur soi ? Plus dure sera la chute du Dow Jones."

Patrick Besson, "Pauvre Amérique", Le Point 2032 du 25 août 2011